Il existe dans l’ouest de la Suisse,
un vallon bordé de forêts profondes, constellé d’abruptes gorges, de cours d’eau torrentiels et de sombres grottes où châteaux ancestraux et forts isolés surplombent d’étroits défilés.
Pays de Contes et de Légendes, c’est aussi le royaume des Fées, ou plus exactement d’une Fée, la mythique Fée Verte.

Je vous parle du Val de Travers, contrée qui s’étend du Lac de Neuchâtel à la frontière Française,  berceau d’un spiritueux à la sulfureuse réputation…L’ABSINTHE.

Appelée également Fée verte ou Bleue, accusée des pires maux et interdite en France jusqu’en 2010 (en 2005 pour la Suisse) ancêtre du Pastis, muse des écrivains et des poètes décadents, c’est aussi une formidable histoire transfrontalière qui mérite qu’on s’y intéresse.

La Composition et la Fabrication….

À l’origine l’absinthe est une plante (Artemisia absinthium)  qui doit son nom à Artémis, déesse grecque. Connue depuis l’Antiquité pour ses vertus médicinales, c’est à partir du 18e siècle qu’elle connût son heure de gloire, devenant le composant principal de la boisson qui porte son nom. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, la liqueur dite « Absinthe » ne s’obtient pas par la distillation de la seule plante d’absinthe.

En plus des deux variétés d’Absinthes, l’Artemisia absinthium et l’Artemisia pontica, on utilise diverses autres plantes selon les recettes et les producteurs.

Par exemple l‘hysope, la mélisse, l’anis, la menthe, la coriandre, la tanaisie, le fenouil ou l’angélique peuvent entrer dans la composition de ce délicat breuvage. 
Quant à la fée verte, il semble que trois plantes sont à l’origine sa coloration:
La petite absinthe, l’hysope, la mélisse ainsi que la véronique officinale.

Pour faire simple (et court) concernant la fabrication, on dira que ce savant mélange de plantes séchées est macéré dans de l’alcool à 85 degrés additionné d’eau, puis distillée.

La Petite Histoire…

La première distillerie industrielle d’absinthe a été fondée en 1797 à Couvet (NE) par Daniel-Henri Dubied et son gendre Henri-Louis Pernod. Pendant une trentaine d’années l’absinthe reste une boisson régionale essentiellement consommée dans les régions transfrontalières de Neuchâtel et Pontarlier.

Par la suite cette boisson se popularisa à travers toute la France, à tel point que début 1900, un verre d’Absinthe coûte moins cher qu’un verre de vin!

La Fée Verte est trop bon marché, donc trop consommée, si bien que les ligues antialcooliques de l’époque tirent dessus à boulets rouges, l’accusant de tous les maux… Les milieux de la viticulture et des eaux-de-vie concurrentes se joignent à la  révolte de parts et d’autres de la frontière, organisant manifestations et pétitions…
La sentence tombe  le 5 juillet 1908 lorsque le Peuple Suisse accepte de prohiber «la fabrication, l’importation, le transport, la vente, la détention pour la vente de la liqueur dite absinthe dans toute l’étendue de la Confédération».

La loi entrera en vigueur le 10 juillet 1910 et la France suivra en 1915…. 

Aujourd’hui tout le monde est revenu à la raison…la production d’Absinthe est autorisée, mais les taux d’alcool, de thuyone et de fenchone font l’objet d’une législation.

Pour terminer…

Depuis peu, j’ai découvert que cet alcool était plein de finesse et de subtilité… Cela m’a poussé à m’intéresser davantage à ce sujet. Au point d’en utiliser dans ma cuisine et de partager avec vous cette belle histoire!
Et bientôt je vous proposerai une recette à l’Absinthe toute simple à réaliser chez soi! 

Un plat sur la carte du Pont de Brent: « La vinaigrette d’Écrevisses au Fenouil et à l’Absinthe »

Après tout ça, si l’envie vous prend de déguster une Fée Verte, je vous conseille l’Absinthe de la maison « Larusée » dans le canton de Neuchâtel, un superbe produit!  

Et pour poursuivre la découverte:

– La fête de l’Absinthe de Boveresse dans le Val de Travers
– Quelques producteurs locaux d’Absinthe